Alors que les entreprises investissent massivement dans la publicité en ligne pour toucher de nouveaux publics, un phénomène grandissant menace leur sécurité : le malvertising. Cette technique malveillante détourne les régies publicitaires légitimes pour diffuser des malwares à grande échelle. Invisible, difficilement traçable, et souvent indétectable par l’utilisateur lambda, le malvertising cible aussi bien les particuliers que les grandes entreprises, avec des impacts parfois désastreux. Retour sur un fléau numérique en pleine expansion.
Qu'est-ce que le malvertising ?
À l’ère du numérique, la publicité en ligne est devenue un canal stratégique pour toucher de nouveaux publics. Cependant, ce canal peut également devenir un vecteur de cybermenace. Le malvertising, contraction de “malicious advertising”, consiste à injecter du code malveillant dans des campagnes publicitaires légitimes. Contrairement aux attaques classiques qui nécessitent souvent une action de l’utilisateur, le malvertising peut s’exécuter automatiquement dès l’affichage de la publicité. Cette particularité le rend particulièrement dangereux pour les institutions financières, où la protection des données sensibles et des systèmes critiques est essentielle.
Les vecteurs sont multiples : bannières infectées, iframes, scripts JavaScript malveillants ou publicités HTML5 redirigeant vers des kits d’exploit sophistiqués. Une fois activé, le malware peut chiffrer des données, installer un cheval de Troie donnant un accès à distance ou détourner les ressources d’un poste pour du cryptojacking. Même des sites réputés peuvent diffuser ces contenus infectés, exposant ainsi les utilisateurs et les systèmes bancaires à des risques majeurs.
Comment le malvertising menace le secteur financier ?
Dans le contexte des établissements bancaires et d’assurance, le malvertising prend une dimension critique. Les employés accèdent quotidiennement à des plateformes internes et à des services cloud via des navigateurs standardisés ou des environnements protégés par des proxys et VPN. Une publicité compromise sur un site externe peut devenir un vecteur d’intrusion dans ces environnements si les systèmes ne sont pas correctement durcis ou patchés. Les scripts malveillants peuvent contourner certaines protections, capturer des identifiants, espionner des transactions ou exfiltrer des données sensibles. Les conséquences pour les institutions financières sont lourdes : pertes financières directes, impacts réglementaires liés au RGPD ou à la législation bancaire française, et dommages réputationnels difficiles à quantifier.
Les dangers pour les utilisateurs et les entreprises
Le malvertising est une menace à la fois pour les collaborateurs et pour les systèmes critiques. Pour les employés, il peut entraîner la compromission de leurs terminaux, le vol d’identifiants et la perte de données personnelles ou professionnelles. Pour l’entreprise, les impacts sont multiples : perturbation des opérations, atteinte à la réputation, sanctions réglementaires et coûts financiers. Sa particularité réside dans sa capacité à rester invisible, ce qui complique la détection et la mitigation. Les directions cybersécurité doivent donc considérer ce vecteur comme stratégique et non comme un risque périphérique.
–> Découvrir aussi notre article sur le role de l’AI dans la lutte contre les fraudes financières
Prévention et détection avancées
La lutte contre le malvertising nécessite une approche multi-couches combinant technique, organisation et sensibilisation. Les solutions techniques incluent le filtrage des flux publicitaires via des proxys sécurisés, l’analyse comportementale des postes et l’utilisation d’EDR et de SIEM pour détecter les anomalies et redirections suspectes. La mise en sandbox des navigateurs métiers permet d’exécuter les scripts dans un environnement contrôlé et d’identifier les comportements malveillants avant qu’ils n’atteignent les systèmes critiques.
Côté organisationnel, les politiques de sécurité doivent inclure la surveillance des campagnes publicitaires internes et externes, ainsi que des audits réguliers des régies utilisées par l’entreprise. La sensibilisation des collaborateurs demeure cruciale : détecter des redirections suspectes, éviter de cliquer sur des publicités non vérifiées et signaler tout comportement anormal peut réduire significativement le risque d’infection.
Exemples sectoriels et études de cas du malvertising
Le malvertising ne se limite pas aux plateformes grand public. Des campagnes ciblant LinkedIn et d’autres portails professionnels ont été exploitées pour infecter des navigateurs non patchés. Dans certaines banques européennes, des bannières injectées dans des newsletters internes externes ont permis l’exécution silencieuse de malwares sur des postes métiers. Ces incidents démontrent que même des infrastructures jugées sécurisées peuvent être compromises si la vigilance et les protections ne sont pas renforcées.
Synthèse et recommandations pour les directions cybersécurité
Le malvertising illustre parfaitement l’évolution des menaces à l’ère du numérique distribué. Invisible et difficile à détecter, il transforme des canaux jugés sûrs en vecteurs de compromission. Les directions cybersécurité des banques et assurances doivent intégrer ce risque dans leurs politiques globales, en combinant veille, détection comportementale, sensibilisation et partage sectoriel. La prévention repose sur une approche collective et proactive : filtrage des publicités, surveillance des postes et systèmes, mise à jour régulière et participation active aux groupes sectoriels. La menace est diffuse, mais la réponse peut être structurée et efficace lorsque l’ensemble du secteur collabore.
Le rôle du Forum des Compétences dans la lutte contre le malvertising
Dans le cadre de ses travaux sur la cybersécurité du secteur banque et assurance, le Forum des Compétences s’appuie sur ses différents Groupes de Travail. Ceux-ci permettent aux membres de :
Partager des indicateurs de compromission ou des informations sur des menaces émergentes.
Tester collectivement des outils de détection et de protection.
Organiser des retours d’expérience sur des incidents, dans un cadre sécurisé et anonyme.
Échanger avec des experts et pairs du secteur sur les stratégies de défense et de durcissement des systèmes.
Ce partage collaboratif permet d’élever la maturité collective face à une menace encore trop sous-estimée.
Alors que les entreprises renforcent leurs défenses sur les vecteurs traditionnels, les attaques de malvertising viennent brouiller les pistes. Invisible, souvent asynchrone, difficilement détectable, le malvertising illustre l’évolution des menaces à l’ère du numérique distribué.
Dans ce contexte, seule une approche intégrée mêlant veille, sensibilisation, détection comportementale et partage sectoriel permet de réellement réduire les risques. Les directions cybersécurité doivent considérer le canal publicitaire comme un vecteur d’attaque à part entière – et non comme un simple outil marketing périphérique.
Grâce au Forum des Compétences, les groupes français peuvent croiser leurs expertises, mutualiser leurs efforts, et anticiper collectivement les campagnes malveillantes à venir.
La menace est diffuse, mais la réponse peut – et doit – être collective.
Le malvertising (contraction de malicious advertising) désigne l’injection de contenus malveillants dans des campagnes publicitaires en ligne légitimes. L’objectif est de diffuser des malwares ou des scripts malveillants via des publicités visibles sur des sites web, des applications ou des plateformes tierces. Contrairement à d’autres attaques, il ne nécessite souvent aucune action de l’utilisateur : le simple affichage de la publicité peut déclencher l’exécution du code malveillant. Les vecteurs courants incluent des bannières HTML5, des iframes, des scripts JavaScript malveillants ou des redirections vers des kits d’exploit ciblant des vulnérabilités de navigateurs et de plugins.
Une attaque par malvertising suit généralement ces étapes :
Injection du code malveillant : Les cybercriminels exploitent un réseau publicitaire ou une régie compromise pour diffuser une publicité infectée. Cette publicité peut être intégrée à un site légitime sans que l’éditeur s’en aperçoive.
Affichage de la publicité : L’utilisateur, qu’il s’agisse d’un particulier ou d’un collaborateur dans une institution financière, charge la page contenant la publicité malveillante.
Exécution du code : Le script malveillant s’exécute automatiquement, souvent via une redirection vers un site malveillant ou un kit d’exploit. Selon la configuration et les vulnérabilités exploitées, il peut installer un malware, un cheval de Troie ou exécuter un ransomware.
Propagation et exploitation : Une fois installé, le malware peut chiffrer des données, espionner le système, détourner des ressources pour du minage de cryptomonnaie ou exfiltrer des informations sensibles.
L’attaque est particulièrement efficace car elle utilise un canal considéré comme sûr, rendant sa détection plus complexe pour les systèmes de sécurité traditionnels.
Le malvertising représente plusieurs risques critiques :
Compromission des terminaux : Les postes utilisateurs ou serveurs peuvent être infectés sans interaction directe.
Vol de données sensibles : Les identifiants, informations financières ou données personnelles peuvent être exfiltrés.
Impact opérationnel et financier : Ransomware ou malware de cryptojacking peuvent entraîner des pertes financières, des perturbations opérationnelles et des coûts de remédiation.
Atteinte à la réputation et au cadre réglementaire : Une attaque malvertising sur une institution financière peut provoquer un préjudice réputationnel et exposer à des sanctions RGPD ou à des recommandations non respectées de l’ACPR ou de l’ANSSI.
Difficulté de détection : Le malvertising est souvent invisible pour l’utilisateur et peut rester actif pendant longtemps, compromettant des systèmes critiques sans alerte immédiate.
La protection repose sur une combinaison de mesures techniques, organisationnelles et comportementales :
Mesures techniques :
Filtrer les flux publicitaires via des proxys sécurisés ou des whitelists.
Maintenir les navigateurs, plugins et systèmes à jour pour corriger les vulnérabilités.
Utiliser des solutions de détection avancées comme les EDR, SIEM et sandboxing des postes métiers pour analyser les comportements suspects.
Mesures organisationnelles :
Mettre en place des politiques de sécurité pour encadrer la navigation sur Internet et l’utilisation des outils cloud.
Auditer régulièrement les campagnes publicitaires internes ou utilisées par l’entreprise pour vérifier leur sécurité.
Sensibilisation et préparation aux incidents :
Former les collaborateurs à reconnaître les signes d’une attaque malvertising, comme les redirections inhabituelles.
Définir un plan de réponse à incident incluant le signalement rapide au SOC et la mise en quarantaine des postes suspects.
Maintenir un programme de mise à jour et de surveillance active sur l’ensemble des systèmes.

